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Écrit par 15 h 00 min Tournées et spectacles

GAMIQ 2018: 13 ans de passion

La 13 éditions de le GAMIQ (Le Gala alternatif de la musique indépendante du Québec) se tiendra le 25 novembre 2018 au Café Campus à Montréal. Le travail acharné de Patrice Caron aka PatK pour célébrer et souligner l’excellence de la musique indépendante et alternative du Québec est d’une importance cruciale pour beaucoup d’artistes, et donne un baromètre des tendances musicales à venir. Nous discutons de sa passion, des tendances de l’industrie et des enjeux.

13 ans de GAMIQ, Qu’est-ce qui vous inspire et vous motive pour faire ce gala chaque année?

Une passion pour la musique d’ici qui grandit d’année en année, ha ha. Avec le temps, c’est la mémoire de tout ça qui est la plus préoccupante, qui motive des initiatives « périphériques » au Gala. Parce qu’avec la dématérialisation des médiums qui portent ces projets, des collectivités comme le Québec dépendent de plus en plus des entités extérieures pour les répertorier et les rendre accessibles au plus grand nombre. Des médiums qui ont pour seul intérêt le profit envers ces créations spécifiques, qui n’ont pas encore rentabilisé leurs modèles d’affaires et qui ne sont pas à l’abri d’un problème technique, en une nuit tout pourrait être effacé. Mais faute de mieux, on en changera pas, c’est le consensus actuel et faut faire avec. Et la seule chose qu’on peut faire pour le moment, c’est inciter le public, les consommateurs, à s’intéresser à ces créations ci. Mais quelque soit le médium, la motivation première est, et a toujours été de mettre en lumière la richesse de la création d’ici, d’attirer l’attention du public et des médias ainsi que des autres musiciens ou intervenants de l’industrie sur la quantité de ce qui est produit chaque année malgré tout. Le Gala est l’outil. C’est le fun à monter, c’est très cool d’avoir un événement qui réunit tout ces gens au même endroit le temps d’une soirée, on a l’impression de faire partie d’une communauté plus grande que les cercles d’insiders habituels et ça renouvelle le feu nécessaire pour continuer ce travail. Mais le plus important, selon moi, c’est le avant et le après, quand un élément de ce qu’on fait amène un auditeur à s’intéresser à l’un ou l’autre de ces artistes, médias ou festivals. Ça sauve peut-être une job, ou en justifie une autre, ça nourrit l’infrastructure et la garde en vie peut-être une journée de plus.

Depuis le début de la GAMIQ, quelles sont les grandes tendances dans l’industrie que vous avez remarquées?

Les niches se sont multipliées et les grandes dynasties à la U2 sont en voie de disparition. Il n’y a peut-être jamais eu autant de musiques disponibles qu’en ce moment mais les places en haut de l’échelle sont moins nombreuses. C’est bien pour les mélomanes mais moins pour l’industrie. Parce qu’il y a moins de projets qui génèrent assez de profit pour qu’un investissement soit fait dans la relève. Les structures plus ou moins indépendantes se sont multipliées pour profiter des opportunités que cette situation semble offrir, mais du côté des conglomérats, les acquisitions, les consolidations et les restructurations leur ont permis de palier à l’évolution du marché, et au final, 99% des « indépendants » ne le sont plus vraiment car les nouveaux modèles de distribution obligent tout le monde à passer par ces structures pour profiter d’une visibilité de plus en plus dure à obtenir, ainsi que des résultats qui justifient l’opération commerciale en bout de ligne. Il n’y a plus d’argent ou presque pour le développement artistique, ça dépend souvent de l’artiste lui-même. Des gros pans de l’industrie ont disparus, rendus obsolètes ou non-rentables par la technologie mais dont on commence à sentir les effets, non seulement sur l’industrie en tant que telle, mais aussi sur la création. J’espère que j’exagère, mais j’ai l’impression que l’on revient à l’époque de la médiocrité, du clonage perpétuel et du dénominateur le plus commun possible. Il y aura probablement toujours de la musique originale, mais ça va être de plus en plus difficile de savoir qu’elle existe.

Votre analyse de l’avenir de l’industrie de la musique au Québec? problématiques? enjeux et autres?

Tout dépend de l’engagement politique. Les subventions constituent une grosse base de financement pour la plupart des entreprises, c’est un choix de société et c’est nécessaire pour que notre culture se perpétue. Et les emplois que les subventions génèrent valent autant, sinon plus, que ce qui est consenti à un Bombardier ou autres. Mais comme l’histoire de la C-series, l’argent investi par l’état se retrouve dans les poches d’investisseurs étrangers, sans qu’un retour conséquent soit encaissé par l’état ou les payeurs de taxes canadiens. Il est vital qu’un renversement de vapeur soit fait à ce niveau parce qu’il faudra un jour se demander si le jeu en vaut la chandelle, malgré les retombés en emploi ou la création d’une culture commune. Avec des gouvernements dits « à droite », il est légitime de s’inquiéter du maintien des niveaux actuels de financement public. Et les demandes de majoration seront probablement reçues avec peu d’empathie. Mais sans un investissement majeur dans des infrastructures communes qui profiteront à l’ensemble, la fragmentation du modèle québécois et canadien va s’accentuer, et la différence culturelle sera plus une question folklorique qu’économique. La mentalité du « village gaulois » nous a bien servi par le passé, de la même manière que le passé imparfait auquel certains politiciens veulent nous ramener, il n’y a jamais eu de moment idéal dans notre histoire qui soutient cette pensée magique. Même au gros pic de l’industrie du disque, il y avait de la place pour l’amélioration, notamment dans la relation aux artistes. La situation actuelle pourrait rééquilibrer la balance mais avec les vieux réflexes qui s’éternisent, ça n’arrive pas. Mais il y a  de l’espoir quand même et nous sommes peut-être à l’aube du vrai âge d’or de la musique québécoise et canadienne. C’est juste une question de volonté politique pour que ça arrive.

https://www.facebook.com/GAMIQ

Patrice Caron est également un contributeur à Franconnexion. Vous pouvez lire sa récente chronique ICI.