Si vous ne le connaissiez pas, le produit marketing FN Meka créé par le label Factory News est le premier « rappeur » virtuel à avoir signé avec la maison de disques Capitol Records. Avec son allure d’un personnage de Fortnite, son look un poil cyberpunk imitant aussi l’apparence de certains rappeurs en vogue : dreads colorées, tatouages et marques de luxe ostentatoires, il cumule plus d’un milliard de vues sur son compte TikTok et travaille avec plusieurs compagnies dans son contenu telles que Sony ou Starbucks par exemple.
Au bout d’à peine un mois, la collaboration a pris fin ce mardi car l’identité artistique du projet est finalement jugée raciste et emplie de stéréotypes.
C’est le collectif Industry Blackout, qui vise à défendre l’intégrité de la communauté et le respect de la culture noire, qui a tiré la sonnette d’alarme sur les réseaux sociaux via une lettre ouverte, sommant Capital Records d’agir : « […] nous trouvons que cette caricature est offensante. C’est une insulte directe faite à la communauté noire et à notre culture. »
En effet, le rappeur virtuel (le projet) dont les chansons sont interprétées par un humain dont nous n’avons pas l’identité; est accusé d’appropriation culturelle, de diffuser des stéréotypes, et par conséquent de véhiculer une image négative de la communauté noire. En arborant le N-Word à foison, l’identité artistique du projet frôle la provocation et il n’est pas étonnant qu’il ait suscité une vague de réactions. Toujours selon Industry Blackout, « Cette effigie numérique est une abomination négligente et irrespectueuse envers de vraies personnes qui font face à de vraies conséquences dans la vraie vie. »
Cela soulève la question de la place des artistes virtuels, rappeurs ou influenceurs et de la propension de certains projets d’IA à se retrouver parfois dépassés par leurs propres limites, étant encore dépendantes de la main de l’Homme : les utilisateurs qui alimentent la connaissance de ladite intelligence, ont une tendance – parfois divertissante, tantôt dans l’excès – au trolling et parfois au lynchage médiatique. On pense notamment au bot Twitter Tay en 2016 qui s’était mis à insulter des internautes de communautés minoritaires, et à tenir des propos racistes en moins de 24H.
La rupture du contrat avec Capital Records s’est faite ce 23 août, a annoncé la maison de disques, et cette dernière, en proie aux critiques, se justifie de son choix d’avoir parié sur FN Meka en premier lieu par la volonté d’innover et de s’adapter aux tendances.
De là, quelques questions se soulèvent : FN Meka n’était-il pas un projet étouffé dans l’œuf? Pourquoi vouloir à tout prix se grimer en noir pour faire du rap américain?
La frontière entre appât du gain et innovation devra se dessiner plus précisément si l’on veut pouvoir apprécier les futurs artistes virtuels qui fleuriront sûrement dans les temps à venir.